Si "la violence est la sage-femme de l'histoire" (Karl Marx),
qui sont la parturiente, l’obstétricien(ne) et l’heureux papa ?
On a à peu près tout dit de la violence
qu'elle est partout,
parfois frontale et souvent sournoise,
à l’extérieur et à l’intérieur de soi,
constitutive du système et inhérente à la vie,
parfois gratuite, parfois payante,
injustifiable mais incondamnable,
condamnable mais impérative,
taboue, sacrée, fascinante et dégueulasse,
libératrice, illusoire et exaltante,
canalisable, sublimable et insurmontable,
policière, conjugale et psychologique,
sexuelle, sociétale ou mentale,
symbolique, économique ou religieuse,
passive, proactive ou inconsciente,
rituelle, juste ou préventive,
pacificatrice, structurelle ou épidermique,
systémique, domestique ou génétique
verbale, structurante ou nécessaire,
centripète, matérialiste ou collective,
culturelle,
animale ou philosophique,
héréditaire, cancérigène ou virale,
psychédélique, idéaliste ou théâtrale,
suicidaire, égoïste ou délassante,
lâche, romantique ou héroïque,
thérapeutique, romantique ou baroque,
primitive, idéologique ou individuelle,
éclectique, intermittente ou militante
hygiénique, roborative ou contagieuse,
dialectique, éternelle ou contemporaine,
prémonitoire, préventive ou fatidique,
obscène, obligée ou défoulante,
aliénante, ambiguë et émancipatoire,
réaliste, mystérieuse et classique,
tautologique, totalitaire et réflexe,
vitale,
débile et foudroyée,
actuelle, onirique et bleue,
et même qu'elle est violente,
et même de manière parfois intéressante (ici n'est pas le lieu de donner plus qu'un exemple parmi d'autres, allez deux)
sauf ce qu'elle est :
une « ressource naturelle »
(et par là un bien commun plutôt qu'un mal absolu)
à partager
sans exclusive ni a priori
et selon des critères (toujours) à (re)négocier.
Voilà ce qu'on a confondu sous toutes les latitudes :
un « mal nécessaire » et un « bien explosif ».
Pourtant, l'impasse de la violence est aussi flagrante que l'impasse de la non-violence :
le partage seul départage tout le monde.
En taxant la violence de bien commun, le Collectif MANIFESTEMENT
n'est pas encore Par-delà le bien et le mal
mais déjà sur la voie
de la nietzschéenne inversion de toutes les valeurs.
C'est déjà ça.
Mais qu'est-ce qu'une violence insuffisamment partagée ?
Quelques exemples valent mieux qu'un long discours :
de la justice,
du sexe,
du snuff,
de la pédagogie,
de la bavure,
de la correction,
de la publicité,
et
de la censure.
La violence n'est pas une ressource (naturelle ou culturelle) inépuisable.
La tradition en a conclu à la diabolisation de son déchaînement.
Avec le succès que l'on sait.
D'où la nouvelle hypothèse de travail
politique (et singulièrement post-moralisatrice) :
et si une violence vivable passait plutôt par son équitable partage ?
Une subtile inversion des valeurs distillée par les puissants
préside à leur accaparement de la violence
favorisé par la paralysie de la gent misérable :
ils stigmatisent ce qu'ils se réservent (l'argent, le pouvoir, la violence)
et
louent ce qu'ils dédaignent (le travail, l'honnêteté, l'obéissance).
La violence, c'est comme la drogue : sa pénalisation la déchaîne.
Seule la fin de la condamnation de la violence permettra d'en endiguer les excès.
Donc il faut postuler qu'elle est un bien collectif.
Donc la seule question qui vaille est celle de sa répartition équitable.
Le reste est propagande ou niaiserie.
CQFD
Les plus profondes pensées dans lesquelles s’enracine la nécessité d’un partage de la violence :
Celui qui ne sait pas partager est infirme de ses émotions. (Marc Levy)
On ne jouit bien que de ce qu’on partage. (Madame de Genlis)
La réalité est ce qui se partage. (Bernardo Carvalho)
Un bien n’est agréable que si on le partage. (Sénèque)
Un partage avec Jupiter n’a rien du tout qui déshonore. (Molière)
Les plaisirs que je ne partage pas avec vous, il me semble n’en jouir qu’à moitié. (Choderlos de Laclos)
Plaisir non partagé n’est plaisir qu’à moitié. (proverbe)
La violence, même bien intentionnée, frappe toujours en retour. (Lao-tseu)