Ce que les SDF (en) disent


Julie, gare du Nord, 3 décembre :
« Les éducateurs de rue, ben ils n'éduquent pas !
(...) Un réveillon au Gesù, cela tombe bien : j'ai des choses à lui dire...»

Idem, bistrot rue d'Aerschot, 3 décembre :
(après une soirée mémorable, très calmement)
« (...) et puis là, on se révéra peut-être jamais... »

Moustapha, bistrot rue d'Aerschot, 3 décembre :
« Moi je vous ai raconté ma vie, mais VOUS, c'est quoi votre histoire, où en est-elle votre vie ? »
(en discussion avec deux artistes en travail avec les SDF)

Hamed, gare du Nord, 7 décembre :
« NON, NON, on est pas des sdf, on est tous des MC Solar. Bouge de là, bouge de là. »

Idem, 8 décembre :
« 40 ans que je suis ici, et je n'ai jamais vu tomber le soleil ici.
(...) Comment je me plains moi, je suis un ignorant, je ne connais rien ici.
(...) Je ne t'apprends rien si tu ne me donnes rien. »

Baha-Eddin, gare du Nord, 8 décembre :
« L'opium du peuple, c'est l'Europe maintenant.
(...)
Le juge, vous avez là, 18 traces de piqûres, cela vous fera 18 mois de taule.
Bis repetitat ... j'en ai encore 19 cachées dans le dos, donnez-moi-z'en pour 37. »
(rires)

Anonyme, gare du Nord, 8 décembre :
« Cela fait une semaine que je ne me suis plus lavé, une douche c'est 2 € pour 10 minutes, 3€ pour 15 min.
(il est couché sur un lit de camp, on distribue la soupe)
Va me chercher une soupe, j'ai mal au pieds, ce sera 1 €. »
(1 € est donc le prix du service)

Idem, 9 décembre :
« Ha oui, là! ... place du trou de balle, heu... hum...enfin (une SDF marolienne intervient) ... oui c'est cela place du jeu de balle...»
(il parle des douches accessibles aux sans abri à BXL, prix, conditions, les serviettes...)

Anonyme, gare du Nord, 9 décembre :
« Oui, là ch'suis à la rue, j'ai un cancer... un cancer du sein, .... mais j'irai à Bordet après les fêtes. Je veux m'amuser... Oui là c'est plein de boules (nodules cancéreux), touche... mais touche va... TOUCHE !!! »

Moustapha, gare du Nord, 9 décembre :
« Oui là, mon frère, il veut pas me croire que je travaille comme bénévole.
(il parle du fait qu'il compte coller des affiches)
Il est très cultivé... il m'emmerde toujours avec ses bouquins ... Il a eu un accident, maintenant il est au CPAS. Cela me rend fou, il est très intelligent, il faudrait quand même que cela change, qu'il trouve une place, qu'il devienne chômeur...»
(Toujours à propos de son frère)

Moustapha, gare du Nord, 14 décembre :
« J'ai mis 7 affiches, dans des bistrots, rue Neuve aussi. Il faut que les riches nous entendent.
(...) C'est toujours des bagarres ici, je ne sais plus quel jour de cette semaine, mais un mec à sorti un flingue et tiré 4 fois. Mais heureusement y avait plus de balles dedans. »

Philippe, gare du Nord, 15 décembre :
« Ici la parole on n'y croit pas... Le Casu, c'est dégueulasse, j'y mets plus les pieds. Au moins sur la rue, le froid cela tue les microbes et les poux. »

Moustapha, gare du Nord 15 décembre :
« Il est au "Transit", en Phase IV
(à propos de son ami Dan). Le Casu, un jour dans les caleçons blancs qu'ils donnent j'ai trouvé des poux de corps... Mais le Casu Hopital c'est bien. Y en a beaucoup qui se font des trucs pour y rentrer. »

Tarik, en rue, 16 décembre :
« C'est pas bien de boire, je bois petit peu seulement. »

Moustapha (après le montage des flyers), 16 décembre :
« C'est du travail.
(et puis plus tard) C'est mieux que de traîner à rien faire et à boire des bières. (...) Moi j'ai besoin d'une bière, cela me booste... »

Anonyme, Gare centrale, 16 décembre :
« Quand j'étais à la gare de Mons il y a dix ans, Di Rupo ne m'a pas jeté un regard...ni une pièce.»

Anonyme, Gare centrale, 16 décembre :
« Ici (quartier gare centrale), on connaît tout avant tout le monde, c'est l'effet tam-tam. »

Sabine, boulevard Lemonnier, 17 décembre :
« J’irai pas à votre truc, la manif, ça sert à rien.
(Elle découvre le flyer) Ah, ça c’est bien, cette fierté, cette dignité, très beau votre truc, mais j’irai pas (…) Le problème, c’est pas l’argent. La vraie pauvreté, c’est à l’intérieur. La misère, infinie, là. »

Gui, boulevard Lemonnier, 17 décembre :
« Vous inquiétez pas pour Sabine, je vais essayer de la convaincre. (…) Le problème, c’est tout ces gens qui ont un logement, ou même un travail, et qui viennent où c’est gratuit pour manger.»

Inconnu, servant le « refrain » de beaucoup de SDF, boulevard Lemonnier, 17 décembre :
« Le problème, c’est les étrangers
(= les sans-papiers) qui ont droit à tout, et nous, les Belges, on a rien. »

Anonyme, place Rouppe, 17 décembre :
«
(interrompant la présentation du projet) Ah oui, je sais, l’année européenne de lutte blablabla, c’est un scandale. On n’a rien vu. Donnez (des flyers et des affiches), je sais à qui en donner. Oui, je viendrai, bien sûr. Faut qu’on nous entende. »

Mohammed, boulevard Anspach, 17 décembre :
« L’année européenne de lutte ? C’est une blague totalitaire ! Totalitaire ! (…) Excusez-moi, je crois que je vais pleurer.
(Il pleure, parle très calmement). J’ai demandé à un prêtre si Dieu est croyant. Il ne savait pas. Moi, je crois que Dieu n’est pas croyant, autrement y aurait pas ça (il se montre lui-même et un ami SDF à côté de lui). L’aide, parfois, vient des gens, pas de Dieu. (Répondant à la suggestion que peut-être Dieu n’existe tout simplement pas). Non, je crois qu’il existe mais il est pas croyant. Il s’en fiche. Il en a rien à foutre ! Vous savez ce que ça veut dire, foutre? (Un sourire s’esquisse entre les larmes qui n’ont pas arrêté de couler).

Jean, Delhaize Chaussée de Forest, 18 décembre :
« Aux statistiques sur le nombre de sdf à Bruxelles, tu peux rajouter un zéro.
(...) Il faut être vraiment paresseux pour mourir de faim à Bruxelles.
»

Patrick, Gare centrale, 18 décembre :
« Dans ce livre, tu trouves tout sur les droits des sans abri, difficile de se le procurer (en papier), mais tu peux le trouver sur le minitel.
(...) Une dame de 80 ans me donnait le café et à manger tous les jours, elle m'a dit que grâce à moi elle ressortait de chez elle après des années seule dans son appartement.
(...) Je mange pas la soupe offerte ici
(gare centrale), elle me fait des plaques sur la peau, ils la font avec des vieux restes avariés. »

Welter, gare du Nord, 18 décembre :
« Well, you know, may be in summer, but a demonstration in winter is not a good idea. Weather is too cold !!! (...) God bless you. »

Anonyme, devant "La Pierre d'Angle", asile de nuit, 20 décembre :
« La manif c'est jusqu'à 4 heures (du matin) ? (nous précissons les horaires) Ah, et on dort où ???? »

Hervé, café "Le Corner" à la gare du Nord, 21 décembre :
« Là, votre affiche, c'est quoi ? C'est St. Josse, rouge et bleu. (...) On a jamais vu un SDF habillé comme cela (...). (sur notre demande : qu'aurait-il fait à la place ?) (...) une poubelle et un type, ou une femme, dessous "choisissez"» (il sort une à une ces casseroles du sac qu'il transporte) (...) vous mettez quoi dedans ? »

Anonyme, hall gare Centrale (à 200 m de la place de l'Albertine, lieu de la manifestation), 21 décembre :
« Ils (les SDF) ne sortiront même pas pour aller à 200 m, ici c'est leur chez-soi. (...) Nous avons une vie sociale probablement plus importante que la vôtre. »

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